Autophagie, apoptose et auto-guérison
Notre corps a naturellement la capacité de réparer les cellules abîmées ou usées ainsi que de renouveler celles qui sont hors d’usage. Ces processus sont garants de notre santé et de notre vitalité et nous permettent de bénéficier de ce « rajeunissement cellulaire » au quotidien.
Nous pouvons, grâce à une manière particulière de nous alimenter et de gérer notre vie, favoriser ces processus en nous-mêmes.
Nous aborderons :
- d’abord les notions d’autophagie, d’apoptose et d’auto-guérison,
- l’historique des découvertes scientifiques ayant abouti à la notion d’autophagie
- puis comment ces processus maintiennent l’homéostasie au quotidien
- et, enfin, en quoi le jeûne peut améliorer leurs performances.
L’autophagie, l’apoptose et l’auto-guérison
Définition de l’autophagie
Du grec auto : soi-même et phagein : manger.
L’autophagie est un mécanisme naturel de régulation au sein de l’organisme. C’est la propriété qu’a la cellule de digérer ou dégrader des organites, devenus non-essentiels voire nuisibles ou bien des corps étrangers. Ces déchets sont stockés dans les lysosomes, structures en forme de petits sacs, contenus dans le cytoplasme. L’autophagie se fait grâce à la fusion des lysosomes entre eux. Des enzymes digestives interviennent et détruisent ces éléments cellulaires devenus inutiles.
Les matériaux de base qui en résultent sont soit éliminés par les émonctoires soit recyclés pour réparer ou régénérer. En quelque sorte, les cellules savent faire du neuf en recyclant du vieux.
De plus, l’autophagie permet d’éliminer des corps étrangers comme les bactéries ou les virus. Elle est donc très impliquée dans la guérison des maladies infectieuses.
Définition de l’apoptose
Du grec apo : au loin et ptosis : chute.
L’apoptose a été mise en évidence en 1972 par John Kerr, Andrew Wyllie et Alastair Currie lors de l’étude de tissus par microscopie électronique. C’est le processus par lequel des cellules déclenchent leur auto-destruction en réponse à un signal. C’est donc une mort cellulaire programmée, un processus de suicide cellulaire, extrêmement régulé, qui permet de garder un équilibre constant face à la prolifération cellulaire.
Elle touche plusieurs catégories :
- les cellules sénescentes ;
- les cellules dont le fonctionnement est fortement perturbé et qui ne relèvent plus d’une simple autophagie intracellulaire des structures ayant besoin d’être réparées ;
- les cellules potentiellement dangereuses comme des cellules portant une importante erreur au niveau de l’ADN.
Ce programme de mort cellulaire s’effectue par le biais de protéines enzymatiques, (les protéases) hautement spécialisées que l’on a nommées les caspases.
Les caspases existent dans toutes les cellules sous formes de précurseurs inactifs (procaspases). Leur activation se fait en plusieurs étapes :
- un premier type de caspases « initiatrices » est libéré
- un deuxième type, activé par les précédentes, ce sont les caspases dites « effectrices ». qui vont déclencher la mort cellulaire en dégradant des substrats cellulaires du noyau et du cytoplasme.
Deux voies principales d’activation des caspases ont été identifiées :
- une voie extérieure à la cellule, dépendant de récepteurs comme le TNF ou Fas, protéine transmembranaire appartenant à la famille du récepteur du TNF ;
- une voie intérieure, au sein même de la cellule, mitochondriale.
Cette activation des caspases est également régulée par d’autres familles protéiques, comme le proto-oncogène Bcl-2.
L’apoptose est donc un mécanisme régulateur essentiel qui intervient dans le maintien de l’homéostasie au niveau cellulaire et tissulaire et dans divers processus physiologiques clés, en particulier au cours de l’embryogénèse. Par exemple, c’est l’apoptose qui tue les cellules entre les doigts au cours du développement embryonnaire, pour permettre de les dissocier.
Tout dysfonctionnement dans ce programme extrêmement fin peut avoir des conséquences délétères pour l’organisme et conduire au développement de diverses pathologies. en particulier le cancer ou le SIDA.
Définition de l’auto-guérison
L’auto-guérison recoupe tout ce qui est mis en oeuvre naturellement par l’organisme pour retrouver son état d’équilibre et de santé .
En effet, comme tous les organismes vivants, le corps physique est, de manière naturelle et permanente, en action pour maintenir ou retrouver l’état d’homéosasie. Il s’agit d’un état d’équilibre, qu’il est nécessaire de réajuster à chaque instant, pour se maintenir en santé, c’est-à-dire dans un état de bien-être naturel.
Une vie harmonieuse est le préambule à de bons processus d’auto-guérision. Elleapporte :
- les bons carburants : de l’eau en suffisance, des aliments vivants,
- une bonne oxygénation tissulaire,
- des exercices physiques doux et réguliers,
- une bonne gestion du stress, de notre mental et de nos émotions.
L’autoguérison peut alors se réaliser constamment sans même que nous n’ayons à y prêter attention.
Historique de la notion d’autophagie, doublement Nobelisé en 1974 et 2016.
Les premiers travaux remontent aux années 1960.
Les chercheurs ont observé pour la première fois la destruction par les cellules de leur propre substance en l’évacuant vers un « compartiment de recyclage » appelé lysosome.
En 1974, Christian de Duve, biochimiste belge, a reçu le prix Nobel de biologie pour ses découvertes sur le mécanisme lysosomal.
De nombreuses équipes ont travaillé sur cette réponse cellulaire particulière.
- Elle devient vitale lors d’un manque de nourriture et est d’ailleurs stimulée par des hormones qui mobilisent les réserves de l’organisme, comme le glucagon par exemple.
- Elle parait être fondamentale dans le nettoyage et la réparation à l’échelon cellulaire, les cellules remplaçant continuellement leurs constituants par d’autres nouvellement synthétisés et réalisant ainsi quelque chose de très proche de la jeunesse éternelle.
- Mais, il y a un hic, ce phénomène est grandement entravé lorsque l’organisme est trop bien alimenté !
Dans les années 1990, Yoshinori Ohsumi a identifié les gènes de l’autophagie grâce à des expériences à partir de levures. Il en a ensuite mis en évidence les mécanismes sous-jacents et montré que les mêmes mécanismes étaient à l’oeuvre dans le corps humain. Depuis, de très nombreuses recherches sur ce phénomène ont été publiées.
En 2016, Yoshinori Ohsumi reçoit le prix Nobel de médecine et physiologie pour l’ensemble de ses travaux sur les mécanismes de l’autophagie.
Nous savons maintenant qu’une cellule a la capacité de s’auto-digérer (autophagie) voire de s’auto-détruire (apoptose), pour protéger l’organisme.
Plusieurs grandes voies de recherche sont ouvertes.
- Comprendre le renouvellement des cellules et la réponse du corps à la faim et aux infections.
- Progresser dans la compréhension de maladies où ce processus semble perturbé :
- entravé voire inhibé comme dans les cancers ou certaines maladies neuro-dégénératives (Alzheimer, Parkinson) ;
- au contraire , accentué, comme dans le SIDA.
- Eclaircir les conditions qui provoquent la mutation des gènes de l’autophagie.
- Mieux percevoir tous les enjeux d’un jeûne holistique à visée thérapeutique, qui va grandement solliciter ces phénomènes naturels que sont l’autophagie et l’apoptose.
L’autophagie et l’apoptose existent au quotidien dans l’organisme
Ce phénomène de nettoyage existe naturellement dans le corps même lorsque l’on mange. C’est une façon naturelle pour chaque cellule de notre corps de se nettoyer. Néanmoins ce phénomène est activé et optimisé lorsque nous réduisons notre alimentation, ou mieux lorsque nous jeûnons.
Lorsque l’autophagie fonctionne mal, à cause d’une surcharge alimentaire, de travail ou de stress, les cellules ne profitent pas de l’autophagie de façon satisfaisante et la maladie apparaît. Ce peut être simplement lié à une mauvaise répartition du potentiel vital homéostatique.
Prenons un exemple extrêmement fréquent : trop d’énergie est accaparée à la gestion du stress et la digestion d’aliments trop riches et en trop grande quantité et fréquence et, de ce fait, il ne reste plus de carburant pour alimenter l’autophagie. Cela se traduit par des sensations de fatigue, d’inefficacité sur le plan physique ou intellectuel, un mauvais sommeil ou une impression de lourdeur, d’encombrement. La réponse correcte à cette situation est d’améliorer le rendement énergétique des secteurs trop « gourmands » :
- améliorer la gestion des stress chroniques environnants par différentes techniques ;
- privilégier une alimentation vivante qui va ré-énergétiser le corps ;
- diminuer la quantité de repas et d’aliments dits « vides ou morts » ;
- privilégier des temps de repos et de sommeil suffisants ;
- installer une période de jeûne nocturne assez longue, entre le dîner et le petit-déjeuner du lendemain.
Ceci va susciter un meilleur nettoyage, sur le plan extra mais aussi intracellulaire et une autophagie plus performante.
L’autophagie et l’apoptose sont renforcées pendant le jeûne
Le jeûne libère tous les viscères de la digestion de leur travail et met, de ce fait, toute l’énergie, d’habitude dévolue à la digestion, au service des autres secteurs de l’organisme.
Si l’on pratique un jeûne holistique, à visée thérapeutique, nous allons nous intéresser à améliorer, en parallèle :
- l’oxygénation des cellules par une meilleure respiration et un exercice physique quotidien et doux ;
- la gestion des pensées ;
- le travail intellectuel en se ménageant de grandes pauses ;
- l’accueil des émotions.
Dans ces conditions, un maximum d’énergie est utilisée pour les processus de nettoyage, de réparation et de régénération cellulaire. Nous vivons alors une véritable cure de Jouvence.
L’autophagie est présente dès les premiers jours de jeûne
Dans les premières vingt-quatre heures de jeûne, notre foie utilise son stock de glycogène (forme de réserve de glucose rapidement utilisable) comme carburant.
Ensuite, l’organisme se tourne vers un substitut de glucose : les corps cétoniques fabriqués par :
- l’autophagie des muscles (protéolyse) d’abord, sur un temps très bref de l’ordre de vingt quatre heures, d’où l’impérieuse nécessité du repos physique dans les deux premiers jours car on ne soumet pas à un travail important des muscles qui sont en train de se nettoyer et de se réparer ;
- l’autophagie des lipides ou graisses de réserve (lipolyse) dans un deuxième temps.
La fabrication de corps cétoniques à partir des graisses se maintient tant que le jeûne perdure et que les réserves ne sont pas épuisées.
L’autophagie permet de maintenir l’homéostasie au cours du jeûne
Lors du jeûne, les cellules ont la capacité de recycler des structures cellulaires endommagées en molécules utilisables pour leur métabolisme. Elles vont ainsi générer de l’énergie et récupérer des matériaux de base via leurs déchets.
De plus, l’autophagie se déroule avec un merveilleux discernement. L’organisme choisit d’abord des déchets, puis des tissus endommagés et ce, d’autant plus qu’ils ne sont pas fondamentaux pour le maintien de la vie. Plus un tissu ou un organe est secondaire pour la vie, plus il est consommé ; plus il est important pour la vie, et plus il est protégé.
Ainsi, sur un jeûne long de deux à trois semaines, une personne perd en moyenne de 6 à 12 kilos, en fonction de sa taille et de son surpoids au départ. Cependant le cœur et le cerveau restent sur leur poids de départ. Par contre, les tissus dysfonctionnants, sclérosés, les amas de matière (tumeurs, kystes) et les réserves graisseuses, bien évidemment, auront diminué voire disparu.
L’autophagie permet le nettoyage intracellulaire
Le jeûne constitue en lui-même une merveilleuse façon de se détoxifier :
- en stoppant toute possibilité d’ingérer des toxines alimentaires ;
- en nettoyant le milieu extracellulaire avec l’eau, les tisanes et les bouillons ;
- en réparant la muqueuse digestive, qui est mise au repos physiologique.
De plus, le jeûne active l’autophagie, grâce à toute l’énergie dévolue au secteur digestif qui est disponible pour nettoyer, réparer et régénérer à l’échelon cellulaire.
Nous avons, ainsi, une action détoxicante à l’intérieur même de nos cellules.
Il est important de noter que la majorité des techniques de détoxication visent plutôt l’élimination des toxines contenues dans le sang ou dans le milieu extra-cellulaire qui baigne et nourrit nos cellules.
Cette détox, tant à la mode, se fait par un rincage de l’organisme grâce aux émonctoires ou organes d’élimination (foie, rein, intestins, poumon, peau). Ces derniers sont parfois eux-mêmes fatigués et donc peu performants pour éliminer les toxines. D’où le peu de résultats fréquents dans ces techniques qui donnent bonne conscience.
Alors que, dans le jeûne, le nettoyage se situe au niveau de chaque cellule qui va bénéficier d’une énergie propre pour nettoyer et réparer au niveau de ses parties usagées.
L’’apoptose génère un renouvellement cellulaire
Des études menées par l’Université de Californie du Sud tendent à prouver qu’un système immunitaire endommagé soit par des traitements lourds comme les chimiothérapies dans les cancers ou tout simplement chez les personnes âgées pourrait largement bénéficier d’un jeûne de trois jours.
Valter Longo, Professeur en gérontologie et sciences biologiques à l’université californienne, explique que « le jeûne donne le feu-vert aux cellules souches pour qu’elles s’activent et commencent à proliférer jusqu’à reconstruire l’ensemble du système immunitaire. Et l’autre bonne nouvelle est que le corps se débarrasse des parties vieilles, endommagées et inefficaces, au cours du jeûne. Si vous partez d’un système immunitaire fortement endommagé par la chimiothérapie ou le vieillissement, les cycles de jeûne peuvent littéralement générer un nouveau système immunitaire. »
Nous n’en sommes qu’à l’aube de la compréhension de mécanismes fins de la régulation du vivant.
Cela nous procure deux sentiments si l’on veut bien se placer devant la grandeur de la vie :
- celui de la respecter profondément et d’éviter de nous comporter comme des apprentis sorciers 🙂
- mais également celui d’aller, comme le propose la Médecine Traditionnelle Chinoise, dans le sens du courant et surtout de ne pas ramer vainement à contre-sens.
C’est une invitation à respecter la grande sagesse du corps qui sait ce qui est bon pour lui et qui sait comment et où pratiquer l’auto-guérison.
Alors, nous pouvons mettre toute notre énergie dans le fait de rassembler les conditions préalables – au plan alimentaire, respiratoire, exercice physique, gestion du stress, des pensées et des émotions- pour que l’autoguérison puisse se réaliser.